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Australie - Les requins de la Grande Barrière

Australie - Grande Barrière de Corail
Dans la Nature avec Stéphane PEYRON
Avril - Mai 1997


Jeudi 8 Avril

Départ de Paris.


Mercredi 9 Avril

Hong Kong. On se pose dans le brouillard…

Journée à flâner dans Hong Kong, et au Concourse Hotel.

Jeudi 10 Avril

Arrivée Cairns. Il pleut ! Mais pas de vent. Orage tropical.


Vendredi 11 Avril

Vol de reconnaissance sur la Grande Barrière. A la recherche de l’îlot désert idéal…

6 heures de vol. Nous allons jusqu’au nord de Lizard Island, vers Stapleton Islet. Je prends en photo plus de 25 îles, dans la perspective d’y établir un camp de base, avec le bateau, pendant le tournage.

Samedi 12 Avril

Décollage prévu à 8 heures, pour repérage sur la Daintree Forest.

Il pleut… mais nous partons quand même, pour essayer de repérer au maximum la zone.
Vol vers le Nord.
Nous tournons autour de “Twin Sisters”, qui elles sont dans la purée de poix. Nous survolons une très belle cascade. Puis descente de la Daintree River, jusqu’à son embouchure.
Reco aérienne du petit terrain de Cow Bay.
Puis nous longeons la chaîne de montagne en direction de Moosman.
Moosman Gorge, magnifique, malgré la pluie et le brouillard en altitude…
Reco au dessus de Port Douglas, puis retour à Cairns.
Après midi à bosser à l’hotel, puis quelques courses.
Après le repas du soir, nous allons traîner dans un bar avec Stéphane et Manu. C’est Samedi soir…

Dimanche 13 Avril

Arrivée de l’équipe.

Travail sur le découpage le matin.
Travail sur les plans aériens l’après midi…
L’équipe (Bruno et Adrien pour le son, et le photographe) vient d’arriver ce matin, ils sont fracassés par le voyage…
Il pleut toujours… Cela fait maintenant quatre jours que ça dure… il vaut mieux qu’il pleuve maintenant que pendant le tournage, mais bon…
J’ai passé deux jours de repérage avec l’Avion, au dessus des récifs de corail, avec l’eau turquoise, et au dessus de la forêt primaire de Daintree, une forêt tropicale épaisse, forêt primaire qui ressemble à celle de bornéo (avec des arbres un peu moins hauts tout de même…). Cette région est vraiment très belle, et garde un côté sauvage dès qu’on s’écarte des lieux touristiques. Ici le tourisme est extrêmement bien organisé. Les japonais sont très nombreux, à venir faire de la plongée, et à consommer leur voyage de noces… Cairns est ainsi une ville très moderne, et très commerciale. C’est une sorte de grand centre commercial au bord de la mer. Il y a la mer, et puis des magazins (genre La Part Dieu), puis une petite plaine, et tout de suite les montagnes recouvertes d’une épaisse forêt. C’est fou le nombre de magazins, qui vendent tous les articles pour les touristes. C’est incroyable.
Je préfére Port Douglas, qui a un côté plus tropical, avec une marina à côté du centre ville, des petits restaurants en terrasse. C’est plus humain.
Côté film, il reste des choses à régler, mais l’essentiel est vraiment fait. La météo reste un vrai problème. Disons que c’est un paramètre à intégrer vraiment dans le planning, alors que nous pensions avoir 30 jours de grand bleu non-stop.
On va faire avec…
L’Avion vole bien, c’est vraiment un bel outil pour ce film et cet endroit, c’est un peu l’outil idéal, pour parcourir des distances énormes, se poser à volonté sur les récifs, plonger à partir de l’avion, etc… c’est un outil extraordinaire !
Je pense que ce tournage va bien se passer. Nous attaquons “cool”, pour rester en forme pour le bateau.


Lundi 14 Avril

Nous avons passé une journée dans la région de Port Douglas, pour rencontrer nos personnages. Andrew d’abord, ensuite Damien, le jeune archéologue, pour fixer les choses par rapport au plan de vol, Ibrahim enfin, de l’Université du Queensland.

Notamment Hazel Douglas, une femme aborigène avec qui nous sommes allé faire un tour dans la forêt primaire. Nous sommes allé voir le “Blue Hole”. Instructif ! Elle connaît des tas d’histoires incroyables. C’était très sympa. Nous avons aussi rencontré un des scientifiques que nous allons filmer et que je n’avais pas vu la première fois.

Il y a beaucoup de travail de préparation sur le film, la mise en place de l’avion, la gestion du temps, qui est compliqué avec ce nouveau paramètre météo (temps pas forcément grand bleu…). Mais je pense que ce tournage va bien se passer.
Nous sommes quasiment prêts, même si je sais qu’il y aura des changements et des emmerdements de dernière minute. Nous nous sommes décidé sur le choix de l’île déserte sur laquelle nous allons nous poser au début du tournage bateau…
Question planning, à partir de Mercredi, nous serons à Port Douglas, à l’hotel où nous étions l’autre fois, donc joignable par fax.
Nous embarquons le Mercredi 23 Avril seulement, sur l’Undersea Explorer (le bateau) pour 16 jours de plongée. Mais nous serons joignables en cas d’urgence par un téléphone satellite.
Enfin, les derniers jours, nous serons à Cairns, de retour au Tradewinds Hotel.

    Je reprends ce fax mardi matin. Hier nous avons passé une journée dans la région de Port Douglas, pour rencontrer nos personnages. Notamment Hazel Douglas, une femme aborigène avec qui nous sommes allé faire un tour dans la forêt primaire. Instructif ! Elle connaît des tas d’histoires incroyables. C’était très sympa. Nous avons aussi rencontré un des scientifiques que nous allons filmé et que je n’avais pas vu la première fois.
Aujourd’hui, nous sommes supposé faire des prises de vue aériennes, mais il pleut encore ! Depuis que je suis là, il pleut ! Ca commence à devenir inquiétant… Il fait beau partout en Australie, d’après les cartes météo, sauf ici, à cause du vent. Il souffle Sud-Est, alors c’est de l’air froid, qui vient taper contre les eaux chaudes de la grande barrière. C’est d’ailleurs la spécificité de l’écosystème du coin… C’est pour cela qu’il y a une forêt tropicale qui s’auto-entretient en permanence. La présence de la forêt fait se condenser de l’humidité qui se transforme en pluie. Il pleut, la végétation se développe, puis les crues, qui entraînent des sédiments, qui viennent dans le lagon, et aussi de la chlorophylle, des micro-organismes, qui vont développer une vie dans le lagon. Ainsi, la chaîne alimentaire commence. Ce lagon produit des eaux chaudes, et c’est au contact de cette chaleur que les vents plus froids venus du Sud produisent de la pluie… La boucle est ainsi bouclée… Tout est lié… Et ici la situation est très claire. Nous en faisons l’expérience tous les jours en ce moment. Le lagon est en plus un milieu très fragile, très sensible.

Le tournage devrait démarrer aujourd’hui. Il y a quand même une grosse pression, une grosse responsabilité sur ce film. Mais je ne ressens pas beaucoup de tension, Stéphane est assez détendu, je crois qu’il a changé ces deux dernières années. Il dit lui-même qu’il a envie de vivre de temps en temps. Cela veut dire qu’il cherche des moments de farniente dans le tournage.
Moi je prépare le film, je fignole le découpage, et je travaille sur les plans de vol, qui sont compliqués… les distances sont énormes !
Je regarde sur le planning, et cela fait déjà une semaine que je suis parti de la maison. Nous n’avons encore pas tourné un plan !
Pour moi, une fois que le tournage sera commencé réellement, les choses vont encore s’accélérer. A mon avis, sur le bateau, ça va être compliqué, parce qu’il y aura la plongée, et puis aussi parce que nous serons 25 à bord… un peu dur à gérer peut être…


Mardi 15 Avril

Aujourd’hui, nous sommes supposés faire des prises de vue aériennes, mais il pleut encore ! Depuis que je suis là, il pleut ! Ca commence à devenir inquiétant… Il fait beau partout en Australie, d’après les cartes météo, sauf ici, à cause du vent. Il souffle Sud Est, alors c’est de l’air froid, qui vient taper contre les eaux chaudes de la grande barrière. C’est d’ailleurs la spécificité de l’écosystème du coin… C’est pour cela qu’il y a une forêt tropicale qui s’auto-entretient en permanence. La présence de la forêt fait se condenser de l’humidité qui se transforme en pluie. Il pleut, la végétation se développe, puis les crues, qui entraînent des sédiments, qui viennent dans le lagon, et aussi de la chlorophylle, des micro-organismes, qui vont développer une vie dans le lagon. Ainsi, la chaîne alimentaire commence à se développer. Ce lagon produit des eaux chaudes, et c’est au contact de cette chaleur que les vents plus froids venus du Sud produisent de la pluie… La boucle est ainsi bouclée… Tout est lié… Et ici la situation est très claire. Nous en faisons l’expérience tous les jours en ce moment. Le lagon est en plus un milieu très fragile, très sensible.


Le tournage devrait démarrer aujourd’hui. Il y a quand même une grosse pression, une grosse responsabilité sur ce film. Mais je ne ressens pas beaucoup de tension, Stéphane est assez détendu, je crois qu’il a changé ces deux dernières années. Il dit lui-même qu’il a envie de vivre de temps en temps. Cela veut dire qu’il cherche des moments de farniente dans le tournage.
Moi je prépare le film, je fignole le découpage, et je travaille sur les plans de vol, qui sont compliqués… les distances sont énormes !
Pour moi, une fois que le tournage sera commencé réellement, les choses vont encore s’accélérer. A mon avis, sur le bateau, ça va être compliqué, parce qu’il y aura la plongée, et puis aussi parce que nous serons 25 à bord… un peu dur à gérer peut être…

Mercredi 16 Avril

Depuis Cairns, tournage aérien sur “Batt Reef”, avec un Cessna flotteur.

Difficile de caler le vol en patrouille… Mais nous faisons des images au ras de l’eau avec le jaune. Bruno n’est pas très content, mais moi si, au vu des images.

“Remember when you where young…” les petites enceintes du walkman de Peyron diffusent Pink Floyd… Incroyable ! Je n’ai pas écouté cette musique depuis des années. “Rappelles toi quand tu étais jeune…” Je me rappelle quand j’étais jeune… Je n’ai pas beaucoup vieilli. Juste accumulé deux ou trois expériences. De ces moments qui vous transportent, qui vous tordent le coeur. Des moments de douleur, ou de solitude, mais aussi des moments de gaité, de bonheur partagé, ou de mélancolie…
Ce n’est pas vrai qu’on oublie les moments difficiles. Ils sont quelque part au fond de vous même, et ils ressortent parfois, au hasard d’une association d’idées.
Je suis parfois semé de doutes, de questions. Normal. Des questions…
Mais en même temps, et ça peut paraître contradictoire, j’ai parfois le sentiment inverse. C’est marrant, j’ai aussi l’impression d’être de plus en plus serein dans ma vie. Je veux dire par là qu’il y a une sorte de force en moi, qui me rend difficilement vulnérable. Je ne sais pas si ce sont les quelques expériences dures de ces derniers mois qui m’ont fait cet effet, ou alors le fait d’être père, ou alors les années qui passent, ou alors un peu de tout ça ? En tous cas, c’est net. Je le ressens ici de manière très nette.
C’est vrai aussi que ce pays est facile à vivre. Pour nous en tous cas, qui sommes là dans un but précis, avec un certain nombre de moyens à notre disposition.
Tout ça pour parler des questions qu’on se pose… De la manière dont on se sent.

Ce soir, le ciel s’est dégagé. Les étoiles partout. Demain je suis quasiment sûr que nous aurons une belle journée de tournage. Nous irons voler avec l’Avion, au dessus de la forêt s’il fait beau. Et puis après au dessus des récifs de corail. Enfin des premières images ! Aujourd’hui, ça a failli, mais il y avait encore des averses au milieu des grandes éclaircies.
A midi, au moment du repas, Bruno s’est jeté dans la piscine pour sauver un bébé… La mère regardait du bord… Même pas un merci, pas affolée la maman ! En fait il y avait une sorte de petit bassin à remous, et le gamin (en dessous de deux ans) s’y amusait ! Loin du regard de sa mère… Et puis le gamin n’a pas vu la marche, s’est avancé encore d’un pas, et a disparu sous l’eau. Nous l’avons vu, nous mangions à côté. Bruno s’est jeté instantanément dans la piscine, a emjambé le muret du jaccuzi, et a plongé pour sortir le gamin hors de l’eau. Sa tête avait disparu depuis un moment déjà… Il hurlait en ressortant ! Quelle panique…!


Je reprends cette lettre Mercredi 16 - 22 heures heure locale. Ca y est : tout s’accélère… Ce matin, c’était notre première journée de tournage. Plan aériens avec l’Avion et un petit avion Cessna à côté pour les images. Le tout au dessus du récif. C’était magnifique. L’eau turquoise à perte de vue, avec les patates de corail. Il a fallu éviter les averses… synchroniser les deux avions question vitesse, etc… pas facile ! Mais je suis content. Nous avons d’ores et déjà de très belles images aériennes du récif. Des images qui font rêver.
Il ne reste plus qu’à construire l’histoire ! Demain, nous tournons avec Hazel Douglas, une aborigène, qui doit nous emmener au “Blue Hole”, une vasque dans une petite rivière dans la forêt. Le tournage démarre vraiment. Le “Blue Hole”, c’est une vasque au milieu de la forêt primaire. Il y a des petites tortues, et des sortes d’écrevisses géantes, et des petits poissons. Les grands arbres autour protégent du soleil. Ce n’est pas loin du tout de la piste. Une journée facile et intéressante, l’aborigène doit raconter les histoires de sa communauté, et les légendes de la forêt. Pour eux, chaque plante, chaque animal est la réincarnation d’un être humain, donc un esprit, qu’il convient de ménager. Ainsi, quand les abos sont obligés de couper un arbre de la forêt, ils en replantent immédiatement un autre à la place, pour le remplacer.

Voilà, il faut encore que je prépare le matériel pour demain.
Aujourd’hui, nous nous sommes déplacé à Port Douglas. Nous serons à cet hotel, le Torresian Resort, jusqu’au Mardi 22 au soir. Nous embarquons le 23 au matin sur l’Undersea Explorer, le bateau, pour 16 jours.


Jeudi 17 Avril

Tournage au “Blue Hole”, avec Hazel Douglas et Andrew.

Démarrage difficile, avec Adrien et Bruno qui se prennent la tête sur le placement. Nous tournons à deux caméras. Belle discussion, au bord de l’eau.
Puis tournage d’images avec le caisson, et des ambiances forêt en béta.

Vendredi 18 Avril

Rendez vous au petit matin à la Daintree River. Je suis un peu dans le seau, après ces activités des derniers jours.

L’avion se pose. Tournage du breifing cartes, puis décollage.
Survol du Daintree National Parc.

5 h 30, sur la jetée de Port Douglas.
Il faisait chaud ici, il n’y avait pas un brin d’air. Les étoiles brillaient encore, mais le jour commençait à poindre.
Une grosse journée de tournage commencait : nous sommes partis pour survoler la forêt avec une femme aborigène, et un archéologue à bord de l’avion jaune. En même temps, il fallait caler des plans aériens de l’Avion, faits à partir du petit Cessna. A 5H30, sur le quai, je devais prendre la décision de faire ou pas ce vol, qui engage des heures de prise de vue, de carburant avion, etc… Finalement j’ai lancé l’opération, et j’ai bien fait, nous avons eu une météo correcte. Pas parfaite, mais nous avons eu quand même beaucoup de chance, nous avons pu survoler les montagnes et la forêt, les cascades, etc… J’étais à l’intérieur de l’avion, et Bruno filmait à partir du Cessna (c’est un petit avion, et celui-ci est sur flotteurs, ce qui permet de se poser sur l’eau).
Dans l’Avion, c’était bien. La femme aborigène (Hazel) faisait le premier vol de sa vie… Elle revoyait ainsi les lieux qu’elle a rêvé depuis son enfance. Les abos voyagent dans l’espace à partir de leur cerveau. Ils se racontent les histoires de génération en génération, et vivent ainsi leur histoire, leur passé, le présent, et leur futur. C’est le “Dreamtime”, le temps du rêve. Une des plus anciennes traditions orales du monde, qui fait appel à la transmission de savoir des lieux et des esprits de génération à génération.
C’était un beau vol. Difficile à filmer, car beaucoup de turbulences, mais intéressant. Cette après midi était off, du coup, ce qui m’a permis de déruscher les cassettes tournées aujourd’hui. Il faut sans arrêt caler le planning du lendemain, et c’est finalement la chose la plus compliquée, car faisant intervenir des tas de paramètres. Quand nous serons sur le bateau, cela devrait être plus facile.


Samedi 19 Avril

Journée de Stand by. Rythme un peu bizarre, mais je sais ce qui nous attends pour la suite. Alors ce n’est pas la peine de cramer l’équipe dès les premiers jours.

Préparation de tout le matériel pour le bateau, et aussi essai du caisson dans la marina de Port Douglas.
Le soir, nous mangeons chez les “toons”, chez qui nous avons passé un deal…

Dimanche 20 Avril

Dimanche matin. Hier, c’était une sorte de “Day Off”, servant à la préparation du matos pour le bateau, des essais avec le caisson étanche pour filmer les crocodiles, etc…


Je t’ai eu au téléphone hier soir, c’était bien. C’est bien d’avoir des nouvelles… Je crois que j’aurais maintenant beaucoup de mal à partir de longues durées sans avoir et donner des nouvelles. L’Australie, c’est un tournage idéal pour ça.
Il y a des jours où on sent plus que d’autres l’énorme distance qui nous sépare. Je suis de l’autre côté de la terre, et c’est vraiment loin.

Et en même temps, il m’est arrivé des tas de fois d’être aussi éloigné. Au Pakistan par exemple… Quelle histoire ! Je repense souvent à cette descente infernale dans le mauvais temps, ce retour sans fin, avec le mal au ventre… J’étais arrivé dans un sale état… Je revois cette salle des urgences à l’hôpital de Die. Je pleurais parce que c’était enfin terminé. Voici un bout de mon journal de bord, d’ailleurs pas encore fini d’écrire, une histoire chassant l’autre :

“Après une heure à plat et la traversée de la rivière Shimshal, le sentier remonte pendant longtemps. C’est la partie la plus diificile du parcours pour moi. Le frère d’Iqbal est parti ce matin tôt avec mon sac. Je reste seul avec Ali, et mon petit sac de la journée. Il ne faut pas qu’il m’arrive quelque chose maintenant. Que pourrait faire Ali seul, dans ces pentes d’éboulis qu’il faut parfois franchir avec de l’élan pour éviter de glisser avec les éboulis...?
Il neige maintenant, la température a dû baisser... Je me fixe des objectifs. Le regard bas sous la capuche qui dégouline, j’entrevois la suite du parcours. Loin, là bas, ce virage qui se découpe dans le vide. Disons qu’il faut aller jusque là bas. Je marche comme un noctambule.
La neige et la pluie font maintenant se décrocher d’énormes blocs de rochers qui dévalent les pentes...que nous traversons. Partis de plusieurs centaines de mètres au dessus de nos têtes, dans des amoncellements de blocs incroyables, ils se fracassent cent ou deux cents mètres plus bas, dans la rivière, au fond du canyon, après s’être éclaté en mille morceaux. La poussière se mêle à l’écho du fracas de ces blocs dans la vallée.
Dans les passages délicats, Ali lève la tête pour essayer d’anticiper. Nous regardons vers le haut, puis passons en courant ces couloirs où les pierres sifflent autour de nous. Tout à coup, un énorme craquement: un véritable “piano” vient de se fracasser à quelques dizaines de mètres derrière nous. Un bloc qui devait peser quatre ou cinq tonnes...”

Ensuite il y a eu la descente vers Gilgit, puis les gorges de l’Indus, etc…
Un sacré souvenir, un incident qui est mal tombé dans l’année. J’aurais tant voulu boucler cette affaire. Je crois que j’aurais fait de très belles images sur cette hitoire, en étant en forme.
En rentrant, je prévois de reprendre une activité sportive régulière, quoiqu’il arrive. J’ai trop besoin de ça. J’ai horreur de cette sensation de n’être pas au top de ma forme. L’an dernier, j’ai ressenti souvent ça. En ce moment ça va bien. Mais je sens le besoin de grosses dépenses physiques. Envie de partir très tôt le matin, et d’aller crapahuter sur les hauts plateaux, envie de faire une grosse exploration souterraine, envie de courir dans les chemins du Diois, envie d’enchaîner les longueurs dans la piscine.

Et le bien être moral suit aussi le bien être physique. C’est bien, je rentrerai en forme de l’Australie, et cela sera une bonne base de départ.
Nous sommes Dimanche matin.
Cette après-midi, nous filmons une scène avec les aborigènes, qui va durer un peu dans la soirée. Je rentrerai tard. Demain, nous partons tôt à Cairns, pour faire un vol de prise de vue raccord sur la forêt. Mardi, nous allons sur une petite île en face de Port Douglas, et mercredi nous embarquons sur l’Undersea Explorer.

Ce matin, Bruno est parti tourné d’autres images à Blue Hole, avec le caisson, en essayant de filmer les tortues sous l’eau…
En fin d’après midi, nous sommes à la communauté de Mossman, pour filmer le visionnage de ce que Damien a tourné… Il n’est pas là, et les abos ne sont pas là non plus… Crise… De notre côté, tout est prêt…
Au bout d’une heure, on apprends que Damien a été vu en train de boire des canons dans un bar à Port Douglas. Vincent file le chercher et le trouve complétement bourré !
Nous reportons le tournage de cette scène à demain… Petite journée…
Le soir, coup de fil dramatique depuis La France : "Prof" vient de disparaître, dans un accident d'avion, au lac de Sainte Croix, dans le Verdon.

Lundi 21 Avril

Port Douglas. Lundi après midi.

Depuis hier soir, ici, on essaye d’accuser le coup. C’est un choc terrible.
Tout s’est tellement bousculé dans ma tête…
Je voudrais te donner du courage, t’aider dans ces moments difficiles. Tout le monde se sent impuissant dans ces cas là, sauf ceux qui ont la faiblesse de croire que tout cela a un sens… Mais moi qui suit seul ici, je me sens particulièrement impuissant.
Tu peux ne pas lire ce qui suit. Ce sont des souvenirs. Peut être tu préféres exorciser différement tout cela. Je ne sais pas. Il y a une chose, c’est que tu es chez nous. Et moi je suis loin, je ne peux que me raccorcher à des souvenirs…
D’un côté c’est nul de parler de quelqu’un qu’on connaît peut être finalement peu, même si ça fait quinze ans qu’on le cotoie, qu’on sait ses qualités, ses défauts, ses réactions devant tel ou tel évènement de la vie… Mais je le fais pour moi. Parce que ça m’aide, j’imagine…
Je me souviendrai toute ma vie ma première rencontre avec Prof. Je te l’ai déjà raconté cents fois… C’était pendant Radio Vercors, installée à Die pendant 15 jours, pour les vendanges. La radio fonctionnait deux heures par jour seulement, de 18 heures à 20 heures, deux heures de programme entièrement fabriqués in situ, avec le petit studio installé sous une toile de tente, à l’emplacement actuel de la “petite cave”… Un des derniers soirs, après un repas bien arrosé, nous avons décidé d’aller saluer les auditeurs présents sur l’antenne. André était dans la bande. Il était minuit, et nous avons debouché une bouteille de clairette à la santé des auditeurs du Diois, en les invitant à venir la partager avec nous… Cinq minutes plus tard, Prof s’est pointé, en robe de chambre, mal rasé, avec un verre à pied dans la main… C’est comme ça que je l’ai connu…
Je me souviens aussi de ta première arrivée dans le Diois. La route dans le brouillard, le boulanger qui bloque la route aux Nonnières, l’arrivée à Die, dans la petite rue des casernes, Prof qui nous attendait. Et cette chambre d’amis, avec le petit avion en bois qui volait sous un plafond de nuages en papier de soie… Prof au petit matin, qui à l’époque se levait parfois tôt, et préparait un petit déjeuner qu’on faisait traîner jusqu’à point d’heure…
Je me souviens de Prof quand nous travaillions ensemble à la radio, de l’autre côté de la vitre du studio.
Je me souviens de lui sur “Ligne Blanche”, pendu au généphone. Toujours en liaison avec la surface…
Prof dans les tournages… Je le revois pendu dans les falaises, en train de préparer sa mixette, ses micros et ses cables. Je le revois le matin, toujours à la bourre, parfaitement insupportable dans ces moments là. je le revois “à la ramasse” avec ses cables qui pendent de partout, ses yeux bouffis derrière ses petites lunettes rondes…
Je le revois à la maison, quand il passait boire un coup, partager un moment de nos vies… On réalise toujours quand ils disparaissent comment nos proches étaient importants dans notre vie… Je veux dire que je sais bien qu’on ne dit pas assez à ceux qu’on aime qu’on les aime… Pourquoi ?
Le temps passe, et un jour tout se brise, d’un coup, bien sûr…
Prof aimait la vitesse.
Il est parti en jouant. Au jeu qu’il préférait. Il aimait rouler vite, déraper sur la neige, en ski ou en voiture. Il n’était pas très bon à ce jeu là, mais il aimait… Et savait faire partager son plaisir dans ces moments là.
Et il aimait avant tout voler… Ses indescriptibles histoires de delta… Son vol incroyable sur Glandasse, au coucher du soleil, et la fois où il volait sur les crêtes de Vassieux en suivant un cerf qui bondissait dans la neige… C’est comme ça qu’on l’aimait…
Parfois nous poussons le bouchon un peu loin. Je sais ces moments là. J’en ai vécu. Nous faisons un métier extraordinaire, mais nous prenons aussi des risques. Le tout est de les calculer. Parfois un des paramètres nous échappe, et c’est le trou noir. On a vite fait de dépasser les limites. J’en ai une conscience toute particulière, pour m’être engagé loin…
Il est parti et c’est un avertissement, aussi. Nous en avons tous eu plusieurs, déjà… Je sais depuis longtemps qu’on est jamais tous seul, et qu’on ne fait pas comme on veut. Je veux dire que parce que je suis avec toi, je me comporte différement. Je prends moins de risques. C’est sûr. Je m’engage moins. Je recalcule les marges de sécurité en permanence.
Tu me sais prudent. Je le suis au maximum. Il est évident qu’aucune image ne vaut une vie. Je l’ai toujours dit. Il faut relativiser en permanence. Même si on est passionné. Bien sûr Prof ne travaillait pas ce jour là, mais il était pris à fond dans son histoire, celle qui lui était intimement personnelle. En même temps, c’est cela qu’il faut admirer, respecter, même si c’est dur pour nous qui restont.
Il est parti en jouant… Il faut se dire qu’il a eu une très belle vie. C’est juste insupportable pour ceux qui restent…
Je l’imagine au ras de l’eau, à bord du petit avion, en train de rigoler. De chaque côté les montagnes du Verdon, qui défilent. L’eau sombre aux mille nuances. Je connais ces moments là. Ils procurent tant de plaisir…
Il nous a tous eu, parce qu’il était le plus méchant…

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Tournage de la scène du visionnage, en fin d’après midi. Très belles lumières. Discussion intéressante. Stéphane est dans le ton.

Mardi 22 Avril

Nous partons tôt le matin à Low Isles, avec Ibrahim et son bateau.

Il fait beau, mais beaucoup de vent, alors la mer tabasse un peu.
Sur l’île, il y a beaucoup de vent.
Pendant que Bruno part dans la mangrove avec Jeff le ranger, je tourne une longue scène dans le laboratoire scientifique de Low Isles, avec Ibrahim et Andrew.
Très intéressant.
L’après midi, retour à Port Douglas, et préparation des caisses pour le bateau. Nous embarquons demain matin sur l’Undersea Explorer…

Mercredi 23 Avril

Il ne fait pas très beau. Tout le matériel est embarqué sur l'Undersea. Nous commençons la plus grosse partie du tournage… Cà commence à devenir excitant.
L’Undersea appareille, et nous mettons cap au Nord, direction Cooktown, où nous avons rendez vous avec Georges Munigan, un abo de la région du Cap Melville.
Très vite, dès que nous sommes sortis de la baie de Port Douglas, le bateau se met à rouler et tanguer de toutes ses forces. L’avant plonge dans les vagues, et les embruns passent au dessus de la cabine. Le ciel est noir, il y a beaucoup de vent.
La plupart se couchent dans les cabines. Chacun commence à prendre ses marques.

Jeudi 24 Avril

Au petit matin, en avance de deux heures, l’Undersea arrive à Flinder Island.

Il fait beau, mais il y a toujours beaucoup de vent. Nous jetons l’ancre dans le chenal entre Flinder Island et l’île au nord.
Nous avons rendez vous avec l’avion, pour commencer l’opération “Dugong”.
Tournage sur le pont de l’Undersea.
L’arrivée de l’avion.
Nous nous organisons pour le tournage en synchro depuis l’avion, et depuis les zodiacs, à la recherche des dugongs.
L’Undersea s’éloigne, nous attendons une demi heure, puis démarrons l’avion.
Nous sommes partis un peu vite à mon goût… Juste au moment de décoller, Bill n’a pas vu arriver le gros train de vagues de houle qui vient de la gauche, nous rebondissons sur une première vague pour rentrer de plein fouet dans la seconde… Le parebrise en plexiglass explose ! J’étais en train de m’installer sur les fauteuils, et je prends de l’eau sur la béta !
Nous ne réalisons pas tout de suite la portée de cet incident. En tous cas, nous avons eu très peur.
L’avion est beaché. Nous avons réussi à contacté l’Undersea qui continue l’opération “Dugongs”, et nous attendons qu’ils finissent pour nous rejoindre.
Bill a sorti sa musique sur la plage, et décompresse.
Stéphane et moi avons déroulé les hamacs, et nous attendons dans l’avion.
J’ai eu très peur. Stéphane aussi je crois. Nous décompressons dans les hamacs.
Bill est avachi sur la plage, avec son lecteur de CD et les enceintes. C’est un peu surréaliste…
L’Undersea revient, après la première opération “dugongs”, qui s’avère plus compliquée que prévue…
Nous partons en Zodiac avec Georges pour voir les peintures rupestres…

Vendredi 25 Avril

Suite de l’opération “Dugongs”.

Tournage avec les zodiacs.
L’avion repart à Cooktown.
Puis nous mettons cap sur la Normandy River, infestée de crocodiles.
Tournage dans la mangrove, avec John Mac Gregor.
Rencontre avec les pêcheurs, à l’embouchure de la rivière.
Nous rentrons à la nuit tombante.

Samedi 26 Avril

Nous sommes de nouveau à l’ancre dans le chenal.

Opération “Dugongs 3”. Cette fois ci je compte bien tourner les raccords à l’intérieur de l’avion qui survole Clack Reef.
Mais les conditions ne sont pas bonnes pour décoller.
Tout le monde est un peu tendu. Je ne suis pas rassuré. J’essaye d’oublier le contexte, de relativiser.
Bill a mis les gazs. Nous sommes prêts du décollage, et à ce moment là, nous prenons un vent rabattant en rafale qui couche l’avion… Bill a tout basculé du bon côté, mais le bout de l’aile est passé de justesse au dessus des vagues. Nous étions à 100 kilomètres heure. Trois secondes de plus, et c’était bon.
L’avion encaisse les vagues, et Stéphane dit à Bill d’arrêter. Je regarde les jambes de Bill qui tremblent… Il a eu très peur aussi je crois. A ce moment là, quelque chose bascule dans ma tête. Je me dis qu’il faut arrêter ces conneries, qu’il faut réorganiser les prises de vues aériennes à partir d’un aéroport en dur, en l’occurence Lizard Island. Stéphane me regarde. Je sais aussi qu’il a eu peur. Il faut calmer le jeu.

Nous attendons l’Undersea Explorer, et nous partons avec Bruno faire des images du bateau depuis la colline.
Le soir, barbecue sur la plage à la tombée de la nuit. Très belles lumières. beaux dégadés. Discussions. Une très belle scène.

Dimanche 27 Avril
Dans la nuit, juste après le barbecue, l’Undersea a mis le cap vers le sud. Nous quittons la zone de Flinder Island.
Première plongée décevante à “No Name Reef”. Du courant. La visibilité n’est pas bonne du tout. Mais c’était une plongée pour tester les gens et le matériel.
Puis deuxième plongée à “Cod Hole”, avec les mérous.
La visibilité n’est pas bonne, mais nous tournons quand même une belle scène avec Monique et Stéphane qui “dansent avec les mérous”.

Lundi 28 Avril

Nous avons passé la nuit à l’ancre. Deuxième plongée à Cod Hole, pour tourner les raccords de la scène d’hier.

L’après midi, nous mettons le cap un peu plus au sud, pour aller plonger à Pixie’s Pinnacle, une patate de corail riche en faune et en coraux. La visi n’est pas meilleure, et je ne suis pas bluffé par le décor…
La vie s’organise sur le bateau.
Le soir, nous faisons une plongée de nuit à Pixie’s Pinnacle, avec une très belle ambiance.

Mardi 29 Avril

Nous mettons le cap sur Lizard Island. Nous devons débarquer Georges Munigan et Gillot, faire du fuel pour le bateau, et embarquer trois nouveaux membres d’équipage…

J’en ai profité pour caler deux vols avec l’avion, à partir du petit terrain en dur. il y a beaucoup de vent, il ne fait pas très beau, mais les conditions sont quand même meilleures, et les nuages commencent à s’éloigner en milieu de journée.
Nous faisons un premier vol avec Dave, en survolant un récif au Nord de Lizard, puis un deuxième vol avec Andrew et Monique, en volant au dessus de Ribbon Reef, au sud de Lizard Island. Bruno vole avec le cessna pour faire les images aériennes de l’avion jaune au dessus de la grande barrière.
En milieu d’après midi, nous réembarquons sur l’Undersea, qui a fait le plein et récupéré Bill, et deux hôtesses…

Mercredi 30 Avril

La nuit a été mouvementée. Nous avons mis le cap sur Osprey Reef. J’ai mis le réveil assez tôt, pour tourner une scène avec Stéphane dans la cabine du capitaine.

Les embruns viennent frapper les vitres de la cabine. Le ciel est gris. Le pont trempé par la grosse mer. Le bateau fait des bonds dans la houle. Tout le monde a mal dormi…
Nous ancrons à North Horn, la pointe nord du récif, l’endroit où les courants se croisent, et où toute la faune se retrouve. Toute la chaîne alimentaire est là, des petits poissons jusqu’aux espèces pélagiques, et les requins....
Tout de suite, première plongée de Monique et Richard pour voir les requins. Il s’agit de voir qui est là…
Le soir, nous ancrons à Admiralty, un mouillage à côté de la passe du lagon d’Osprey reef, plus protégé du vent.

Jeudi 1 Mai

C’est la fête du travail, non ?

L’équipe de biologiste a décidé de commencer à tager les requins. Tout le monde est sur le qui vive.
Capture sur la plateforme, dans un premier temps.
Concentration…
Le soir, première plongée de nuit à Admiralty.
Nous utilisons le système de masque Aga pour communiquer. Je suis un peu crevé. Il faut dire que je suis sur le qui vive tout le temps sur le bateau. Gérer l’équipe, faire les plannings, essayer d’anticiper la vie à bord, rester concentré pour assurer les scènes de vie à bord. Beaucoup de tension.
Le début de la plongée se passe assez mal. Je n’ai pas eu le temps de m’organiser suffisament. Tout le monde a sauté à l’eau, et moi je me retrouve dans le courant avec tout le matos, et les lumières, et mon détendeur qui fuse ! Je n’arrive pas à l’arrêter, et je perds tout de suite 40 bars de pression sur ma bouteille…
Je décide de remonter tout de suite.
Pas facile pour Bruno de caler les lumières…

Vendredi 2 Mai

L’Undersea est revenu s’ancrer à North Horn. Il y a une tension particulière ce matin. Une question divise l’équipage : certains veulent tager sous l’eau, capturer à la main les requins. D’autres disent que c’est de la folie, et pensent que c’est nous qui mettons trop la pression pour faire cela…

Bruno ne sait pas quoi en penser. Moi, j’essaye d’avoir les avis de tout le monde, et je regarde surtout Richard, le spécialiste des requins, qui se prépare, et qui fait des signes approbateurs. Après tout, c’est lui qui s’y connaît le plus. Nous sommes obligés de lui faire confiance.
Il faut dire qu’il y a deux mois, Monique s’est fait attraper par un requin et prendre le bras. Elle conserve une grosse cicatrice, et un souvenir pas facile. Depuis cet accident, ils avaient décidé de ne plus capturer les requins sous l’eau, mais de les attraper par la queue, de les hisser sur la plateforme arrière, pour les étudier, les mesurer et les tager.

Samedi 3 Mai

Petit déjeuner avec John et Stéphane.

Plongée John et Stéphane. Cà se passe assez mal.
Deuxième plongée à Admiralty. Je plonge avec Bruno, et nous nous balladons dans le corail.
Discussion dans le labo / Corail, avec Monique, Andrew, et Dave.

Dimanche 4 Mai

Nous quittons Admiralty pour l’intérieur du lagon. C’est la première fois que l’Undersea s’engage dans le sud du lagon. Nous allons y rejoindre l’Avion, pour des prises de vues aériennes d’Osprey Reef.

Vues aériennes d’Osprey. Le cessna est là.
Le soir, l’avion retourne à Cooktown.
Nous tournons une bouffe sur le pont.

Lundi 5 Mai

L’avion revient.

Nous tournons d’abord l’avion qui survole les plongeurs.
Nous volons ensuite avec Monique et Richard sur Osprey reef. Très beau vol.
A la fin du vol, nous tournons les images de récupération des plongeurs pour la scène d’introduction du film.
Bruno sort juste de l’eau, où il vient de filmer les coraux dans l’eau peu profonde du lagon.

Mardi 6 Mai

Ce matin très tôt, l’Undersea a quitté le lagon pour repartir à North Horn. Stéphane et Richard plongent ensemble pour aller voir les requins, qui sont un peu plus nombreux et excités aujourd’hui !

Puis, discussion sur le corail sur la passerelle avant. Nous avons débarqué Bruno, qui fait des plans du bateau depuis le récif à marée basse.
L’undersea remet le cap sur Admiralty, où nous coupons complétement les moteurs, pour enregistrer des voix off de Monique et Richard, qui parlent d’eux et de leur passion.
Cà fait du bien de ne plus avoir le ronronement incessant du moteur pendant un peu plus d’une heure…
Le soir, plongée de nuit. Nous voulons tourner dans une grotte, mais nous n’avons pas encore eu le temps de la repérer… Nous perdons beaucoup de temps à communiquer. Moi je n’ai pas l’habitude de ce masque de communication, et j’ai de mal à passer au niveau des oreilles. Nous réussissons quand même à caler quelques plans… Pas simple…

Mercredi 7 Mai

Nouvelle plongée à North Horn pour Bruno. Il descend à - 35 pour filmer les soft corals. Moi je fais une plongée extraordinaire avec les requins. Ils sont particulièrement nombreux ce matin… Et excités !

Richard, qui essaye d’en attraper de nouveau pour les marquer, nous conseille de rester le long du tombant. Je compte 25 requins qui tournent autour, dont “Madonna”, ce requin femellle au comportement un peu trop agressif au goût de l’équipage…
Deuxième plongée pour Bruno, qui tourne les raccords pour la séquence d’introduction.
Cap sur Admiralty.
Je tourne une séquence de chasse sous marine avec Jhonno, le cuisinier, et Stu, le mécanicien… Bill pilote le zodiac, nous prenons une belle rincée ! Belle ambiance. Monique tourne les images sous marines de la chasse.
Le soir, de nouveau plongée de nuit, qui merde au début, Vincent n’arrivant pas à passer au niveau des oreilles. Finalement, tout fonctionne à peu près bien. C’est une plongée rentable. Nous filmons même un requin en train de se nourrir sur le corail…

Jeudi 8 Mai

Juste après la plongée de nuit, nous avons quitté Osprey Reef. La mer a été moins mauvaise qu’à l’aller… Nous ancrons ce matin à Challenger Reef, un récif sur la route du sud, la route du retour.

Tout le monde commence à être fatigué…
Nous plongeons avec Bruno, pour faire de la macro. Très belle plongée d’une heure sur les patates de corail.
L’Undersea remet cap au Sud, et ancre à Harrier Reef.
Nouvelle plongée d’une heure sur les coraux, qui sont ici plus développés qu’à Osprey reef.
En fin d’après midi, à la belle lumière, nous filmons une discussion entre Monique et Stéphane, sur le pont. Discussion très libre, très sympa.
Le soir, Stéphane, après le diner, lance le thème des aborigènes. Nous filmons une discussion, qui me permettra de lier les scènes.

Vendredi 9 Mai

L’Undersea ancre à Undine Reef, petit ilôt de sable perdu dans le lagon. Un endroit idylllique. L’Avion, à qui nous avons donné rendez vous, se pose sur une eau tranquille. Il fait grand bleu. Nous avons de la chance !

Nous tournons la scène de fin du film, entre Richard et Stéphane. Ils sont sur cet îlot désert, et discutent.
Ensuite, nous filons à Snapper Island, pour débarquer Bruno qui fait des images de l’Undersea à très longue focale, naviguant le long de la côte.
Finalement, nous passons à Low Isles. Ibrahim ne nous a pas attendu. Il est parti !
Nous tournons quand même le coucher de soleil à Low Isles. Encore de la chance cette fois ci : il y a des lumières changeantes, et très belles.
La nuit est tombée. L’Undersea a remis le cap sur Port Douglas. Nous débarquons… 17 jours sur ce bateau, qui se terminent.
Bouffe mémorable au “Salsa”. Nous finissons au “Waterfront”.
Nuit dans le bateau.

Samedi 10 Mai

Journée Off !!!!!

Nous achetons des t-shirts à Port Douglas, et avant de quitter la ville, nous filons chez l’antiquaire que j’avais repéré.
Nous craquons sur des tas de meubles. Les vendeurs sont très sympas. Le problème, c’est el prix du transport par avion…
Finalement, nous rentrons à Cairns, pour nous installer au Tradewinds Trinity Bay Hotel.

Cà y est ! Le gros du tournage est terminé… Nous avons débarqué du bateau ce matin, non sans difficultés… Vraiment bizarre de débarquer après 17 jours d’un bateau sur lequel il y a eu plein d’histoires, plein d’actions, plein de découvertes. Ce matin, nous émergeons lentement. Il a fallu tout ranger… et nous n’étions pas très en forme. C’est le coup de barre de décompression.
Il reste quelques images aériennes à faire, mais tout le film est fini.

Je met à jour un journal de bord, que je n’ai pas pu tenir sur le bateau, car le programme était trop chargé, et taper sur le mac en pleine mer, ce n’est pas facile…
Ici il fait très chaud, toujours, et j’ai de la peine à imaginer les chutes de neige sur le Vercors…

Dans quelques jours je serai à la maison… Un peu plus d’un mois, c’est long… Je sais que c’est trop long, pour tout le monde. Mais je ne regrette rien, car ce tournage était très bien malgré tout, et cela sera un beau film. Comme disait Bill, un photographe à bord du bateau, en regardant le soleil se coucher sur le pacifique : “Comme bureau, il y a pire !” Bien sûr, il a raison.

Dimanche 11 Mai

Journée de tournage aérien, au dessus de la forêt.

Les conditions de vol ne sont pas bonnes. Bruno n’est pas content, ni le pilote de son Cessna, qui voudrait faire mieux !
Nous volons tout de même dans la gorge de Mossman, puis au dessus de la forêt de la Daintree, puis au dessus de la Daintree River.
L’après midi, tout le monde est épuisé, nous nous délassons dans les chambres et le jacuzzi.
Manu s’est occupé de nous négocier l’appartement au dernier étage, et nous déménageons de suite !!!!  Hallucination : grand appart de 200 m carrés, avec un immense salon, trois salles de bain, une immense terrasse, avec un jacuzzi incrustré dans une estrade en bois exotique. Un appart de milliardaire !!
Nous y préparons des barbecues en plein air. Le pied intégral…
Nous testons tout de suite le jacuzzi.

Lundi 12 Mai

Cà y est ! Le tournage est terminé. Ce matin, c’était encore des prises de vue aériennes au dessus du récif de Ribbons Reef, le long de la grande barrière de corail. Un temps magnifique, un bon pilote pour piloter le petit avion qui nous filmait. Des images spectaculaires. De très beaux plans, vraiment…
Je commence juste à décompresser. Nous avons déménagé au dernier étage de la résidence. Nous sommes dans une suite incroyable. Immense, avec de grandes baies vitrées qui donnent sur la mer et sur la ville. Avec une grande terrasse, et un jacuzzi incrusté dans une estrade en bois exotique… De la peine à y croire… Le cerise sur le gateau… Bruno, épuisé, dort sur la terrasse en profitant des derniers rayons du soleil.
Nous allons mettre du temps à récupérer. Le tournage était très dense en fait. Vraiment. Un beau tournage. Mais avec une pression forte sur les épaules, mine de rien. Maintenant, çà va mieux… J’ai passé mon temps à refaire les plannings, à dédramatiser des situations, à gérer l’équipe au mieux… et à tourner !!
La première semaine sur le bateau, nous avons eu du mauvais temps. Cà commençait mal ! Beaucoup de vent. Alors la mer était mauvaise. Difficile de tourner sur le bateau, la visibilité était dégeulasse, l’avion ne pouvait pas se poser. La galère… Nous avons quand même eu des bonnes scènes, au niveau humain.
Puis le reste du tournage, c’était à Osprey Reef, ce récif coralien perdu au milieu de l’océan pacifique, à plus de 100 kilomètres de la côte, entouré de 1000 mètres d’eau…
Il y a eu les requins, les survols du récif avec l’Avion, et les plongées de nuit, avec cette ambiance extraordinaire des projecteurs qui éclairaient les fonds.
Les journées ont été difficiles, car le planning était serré, vraiment. Bruno s’occupait des prises de vue sous-marines, alors que je tournais tout ce qui concernait la vie de l’équipe à bord du bateau. Parfois difficile de gérer les gens, et de tourner en même temps… Tout demande un temps plus important sur un bateau, et en même temps, tout le monde vit ensemble, les uns sur les autres… Spécial !
L’inertie est parfois terrible. Et tu es constamment en train de chercher les gens, qui s’éparpillent aux quatre coins du bateau : salon, cabines, pont avant, passerelle, pont arrière, plateforme arrière…
Mais le tournage s’est bien passé, vraiment. Je suis content de çà. Stéphane était très détendu, et en même temps très concentré sur le sujet, trés attentif. Il a changé en deux ans. C’était agréable.

Je suis fatigué, mais j’ai deux jours pour récupérer avant de rentrer. Le choc sera fort en rentrant. Le décalage est copieux, et le tournage était tellement dense…
Comment dire ?
Travailler sur un format comme celui ci n’est pas évident. 90 minutes, c’est un autre rythme, une autre façon d’aborder les scènes aussi. Et le tournage sous marin ne simplifie pas les choses. Par exemple, pour la plongée de nuit, j’avais prévu une scène complète, assez découpée. Lors de la première plongée de nuit réservée à cette scène, nous avons tourné trois plans montés !!!! Seulement !!!!  40 minutes de plongée pour trois plans. La fatigue qui va avec. Les plongées qui s’accumulent. Bruno était épuisé complétement, alors je faisais attention aussi. Pas simple.
Mais voilà, c’est fini. Il faut se laisser aller. Décompresser. C’est le bon endroit ici.
Pourtant, j’ai déjà envie de monter le film… Tant mieux, parce que çà va être un gros boulot !!
Les deux jours qui restent, je vais en profiter pour boucler au maximum le film ici. Je veux dire qu’il faut penser le film à chaud, avec la mémoire de ce que nous avons tourné. Comme çà je rentrerai l’esprit libre. C’est pas plus mal.
Souvent, quand je rentre, je suis tellement encore dans les histoires qu’il ne m’est pas facile de changer instantanément de vie. Ce n’est pas si simple. J’ai besoin de décompresser totalement, et en fait je repars trop vite derrière, souvent.


Mardi 13 Mai

Nous filons à Port Douglas, pour aller voir le magazin d’antiquaire.

Le soir, nous avons loué une sono, et nous organisons un barbecue sur la terrasse.

Mercredi 14 Mai

Le beau temps régulier s’est installé sur Cairns… Il aurait pu arriver un peu plus tôt ! Le vent a tourné au sud ouest, et apporte de l’air sec mais plus froid, en provenance des hautes pressions du sud de l’Australie. A l’intérieur, dans les déserts, il fait très froid la nuit. Ici, c’est toujours le climat tropical à la bonne température.

Hier nous avons glandé, fait quelques courses. Je suis retourné à Port Douglas, avec Stéphane, pour vooir ce magazin d’antiquités que nous avions repéré l’autre jour. Il y avait des meubles superbes, dont une magnifique banquette javanaise.

Hier soir, nous avons organisé une petite fête sur la terrasse de notre appartement, qui domine toute la baie de Cairns… C’est vraiment un appartement de milliardaire. Mais les gérants de l’immeuble sont très sympa, ils ont fait une réduction terrible à la prod, et comme nous ne sommes pas en pleine saison touristique, c’était possible de nous le louer. La fête était très sympa, nous avions invité les gens du tournage, Peyron était excité comme une puce, nous avions loué une petite sono, et on dansait sous les étoiles ! Cà m’a donné envie d’organiser des fêtes en plein air cet été…
Ce matin, je suis le seul levé. Tout le monde est crevé il faut dire. Le rythme était tellement dense sur le bateau qu’il faut une décompression terrible. Nous n’avons tout simplement plus d’énergie.

Aujourd’hui, il faut que je trouve des cartes marines pour l’émission, et j’ai encore des courses à faire. Je compte aussi glander pas mal !
Demain nous reprenons l’avion, et je serai Vendredi soir à Die !
J’ai hâte de retrouver les repères de cette vie dioise que j’aime bien. Les amis, les discussions qui m’ont manqué, les projets à très court terme. J’ai besoin de cette vie facile en fait. Marre d’organiser des plannings, marre d’avoir à gérer des tas de gens avec chacun leur caractère, leurs humeurs, leurs soucis…
En fait, je crois que je m’en sors pas mal du tout. Et j’aime bien organiser d’ailleurs. Tout le monde ici a apprécié le tournage. J’ai eu des félicitations de toute l’équipe, individuellement. Même le photographe (Philippe Bourseiller, qui était au Groënland en 89), qui est d’habitude toujours un peu taciturne.
Bruno a beaucoup apprécié l’organisation, le fait que je savais où on allait vraiment. Stéphane s’est senti très libre d’être ce qu’il doit être dans l’émission, au lieu d’avoir le souci de réalisation dans un coin de la tête. Il sait que je suis attentif, que je surveille, et il aime cela. Il sait que tout est anticipé au maximum. Quand il pense à un paramètre et qu’il m’en parle, je l’ai déjà intégré et j’ai déjà réglé le problème. C’est vrai que c’est confortable. En même temps, il apprécie notre sensibilité au niveau du tournage, et le fait que je tourne toutes les scènes “live”, sans raccords a posteriori, sans plans de coupe. Tout est découpé pendant le tournage.
Cà lui change des réalisateurs qui demandent de tourner des plans de montée au moment de la descente, ou autre choses… Il a envie de vivre les choses, et n’aime pas être bloqué par ces contraintes là. Je le comprends, moi non plus je n’aime pas çà.
Nous avons tourné près de 50 cassettes béta (plus les images sous-marines en DV), et je n’ai rien “refait”.
Changement de sujet ! Le tournage est terminé !!!
Hier, je pensais à des moments très simples de ma vie dans le Diois. Ces moments du matin en été par exemple. Quand je me lève avant toi, et que je vais chercher un pain frais. L’air est transparent, un peu frais, il y a les habitués du matin, je n’en fait pas partie, mais justement, j’adore ces moments là, je ne sais pas pourquoi… J’ai hâte de rentrer aussi parce que j’ai besoin de ces repères là.
J’ai besoin de ces ballades sur les plateaux, dans ce monde que je connais plus que tout. Je veux dire les grandes étendues de pelouses, les lapiaz blanchis par le soleil, les pins à crochets tordus par le vent. Pour les avoir parcourus en toutes saisons, je ne sais pas encore choisir quelle est la plus belle, mais l’été a ce côté “facile”. Un short, un brave t-shirt, une polaire et une mauvaise gourde, et c’est parti.
J’ai passé des journées entières là haut, et cela me plait toujours. Je veux dire que je ne suis pas attaché à l’image d’une époque révolue. Non. C’est plutôt la sensation que çà fait partie de moi profondément, et aussi l’impression qu’il y a toujours du nouveau. Les reflets du soleil sur les pelouses, l’arrivée du brouillard qui se déchire sur les barres rocheuses, les falaises qui plongent vers les vallées, ces lumières du petit matin dans les sous bois…
Par exemple, je garde la sensation très précise de ce vent frais qui siffle dans les pins, quand on est blotti entre deux racines, à regarder les fourmis qui dansent sur le rocher. Ou le soleil qui écrase les fissures du lapiaz. Et ces gouffres sombres entourés de mousse.
Ces endroits qui sont magiques pour moi peuvent être tour à tour paradis ou enfer. Il fait beau, et tout à coup, tout bascule.
L’orage arrive. On se réfugie dans une petite cabane où on n'arrive pas à faire du feu… Il fait froid. Mais c'est beau !
C'est humide, on dort mal… Le lendemain, on marche la tête engourdie, mais libérés de quelque chose en même temps.
Il faut de temps en temps savoir vivre de peu. Cela resitue les choses. Pendant un certain temps, une forme d’ascètisme procure une “légéreté” bénéfique.
C’est un peu ce que j’admire chez les peuples du désert. Ils n’ont rien, et en même temps ils ont tout. Chaque chose qu’ils portent leur est utile. Quant à nous, nous sommes encombrés d’un fatras d’équipements et de gadjets. Je sais que c’est bizarre que ce soit moi qui dise cela, mais c’est vrai. Moi qui accumule tant de choses.
Je sais pourtant que l’abondance aveugle. Le matériel étouffe le spirituel. C’est vrai. Nous accumulons des pièces, des objets. Ce sont seulement des repères, des traces pour nos souvenirs. Mais ce qui reste au fond, ce sont les émotions vécues, les sentiments d’amour, les idées, les concepts. Qu’est ce qui réchappe d’un incendie ? Les idées. L’homme se retrouve nu dans la rue, et en même temps porteur d’une richesse incroyable. Tout, et seulement : ce qu’il a en lui. Rien de très nouveau, mais des choses qu’il faut rappeler régulièrement.
Je suis au bout du monde, et l’esprit serein. La tête pleine de souvenirs. D’idées qui vagabondent. Je sais tous ceux qui sont partis. Je sais la fragilité de la vie. Une fois encore, je suis passé au travers. La vie mérite vraiment d’être vécue.
Hier soir, je regardais la croix du sud qui jouait à cache cache avec les nuages. C’était la fin de la soirée. Il y avait cette musique de Vangelis (qui plane sur la dernière scène de Blade Runer), et tout était simple. Le saxophone paraissait résonner dans toute la baie illuminée par les lumières de Cairns. On aurait dit une sorte de spectacle son et lumière géant. Les deux skytracers du casino montaient jusqu’aux nuages. On voyait Mars…
Quelqu’un me demandait depuis combien de temps je faisais ce métier. Je répondais quinze ans… Ce n’est pas rien…
J’ai besoin parfois de faire le point. De faire ressurgir ce que j’ai en moi pour le digérer. Sinon, çà reste comme une pile de dossiers sur un bureau. En attente. Pas très bon…
Alors c’est pour cela que j’essaye d’écrire. Organiser un peu ces souvenirs. Comme une trace, le fil conducteur d’une vie. Un livre qui raconterait mes histoires. Un livre dont je prends plaisir à feuilleter les pages. Pas un roman qu’on lit du début à la fin. Plutôt un essai, un carnet de voyages. Une cartographie des chemins et des routes. Toutes ces roulottes, tous ces gens qui me sourient, qui sont rentrés dans ma vie à un moment donné. Des images qui restent à jamais. Des notes, des dessins, des photos aussi. Comme ce gros carnet à spirale qu’on emporte et sur lequel on griffonne quelques notes sans intérêt, mais qui vous relancent à fond dans l’histoire quand on les relit quelques années plus tard. J’en conserve quelques uns comme çà dans le bureau. Des traces.
Amusantes ou émouvantes. Parfois rassurantes.
Mais toujours éphémères, car on peut disparaître du jour au lendemain.

=:-)

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